Ou pour être plus précis : Le cercle littéraire des amateurs de tourtes aux épluchures de patates (titre apparemment trop long selon l'éditeur pour la couverture).
Pour être honnête, c'est ce drôle de titre qui a tout d'abord attiré mon regard dans la librairie. Intriguée par la couverture un peu vieillotte, j'ai saisi l'ouvrage et ai jeté un coup d'oeil curieux sur le quatrième de couverture, puis sur la première page... et sur les cinq premières lettres. Car ce roman est épistolaire. Il nous expose les échanges entre Juliet, une jeune femme londonienne, écrivain mondain à ses heures perdues, et les habitants de Guernesey, lecteurs amateurs entre deux tourtes, après la seconde guerre mondiale.
Comme toujours, il est difficile de parler d'un bouquin sans en révéler toute l'histoire, au cas ou quelques lecteurs égarés sur ce blog voudraient le lire. Attention, futurs lecteurs s'abstenir!
J'ai beaucoup aimé le personnage de Juliet, mais l'ai trouvé un peu ridicule par sa naïveté. Est-ce de l'insouciance consciente pour éviter les souvenirs de la guerre? J'ai tendance à penser que le personnage principal est Elizabeth, lien entre tous, et omniprésente dans les lettres alors que seule absente physique du roman. Cette femme est érigée en héroïne de guerre. Elle représente (selon moi) le courage des anonymes, de ceux qui ont su trouver une certaine dignité humaine presque malgré eux dans cette période si particulière.
Une chose est certaine, même s'ils se rapprochent parfois du type, les personnages sont l'un des points forts des lettres. On a envie de les rencontrer, de les inviter à boire un verre, de leur écrire pour savoir ce qu'ils sont devenus.
De plus, je trouve judicieux le choix de la période du roman. J'ai beau être normande, je ne savais pas à quel points les îles anglo-normandes avaient pu être isolées pendant le conflit. On découvre au fil du récit l'occupation allemande, les sacrifices consentis par les habitants. Avec un tel pitch, La lecture peut paraître rébarbative. C'est compter sans l'irrésistible humour anglais dont les auteurs ont su ponctuer les lettres. Que ça soit dans les quelques épisodes de résistance, dans la timidité maladroite de certains personnages, ou le style très personnalisé de certains correspondants, le sourire est là. Les passages tristes et émouvants ne sombrent jamais dans le mélo, toujours éclairés par un clin d'oeil ensoleillé à la bonne odeur maritime de Guernesey. Les ruines sont encore fumantes... et pourtant l'espoir timide mais bien présent, la volonté de tout reconstruire, y compris la vie quotidienne, révèlent un optimisme rare dans les écrits sur cette époque.
Je sais qu'il s'agit de fiction, et que le texte a été écrit avec soixante ans de recul. Mais c'est simple, quand j'ai fermé le livre j'avais une banane jusqu'aux oreilles, et je mes suis dit que je le relirai quand je n'aurai pas le moral.
Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates, Mary Ann SCHAFFER et Annie BARROWS, éditions Nil, mars 2009, 391 pages.
Et pour les anglophiles : The Guernsey literary and potato peel pie society, The Dial Press/Random House, 2008
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